Autres mammifères...d'ici et d'ailleurs
Rencontres aux alentours de ma région, des montagnes de France ou d'Italie
Le sanglier, ce mal aimé...
La palette d'image que je vous propose sur cette page montre bien mon intérêt pour cette famille. Je crois que faisant parti des mammifères, le genre humain est tout particulièrement sensible aux autres animaux peuplant notre terre. Néanmoins je ne peux décrire ma démarche pour chacun d'entre eux et préfère me focaliser sur un animal que je connais plutôt bien: le sanglier, j'aurais pu écrire sur le loup que j'ai rencontré en Italie mais le sujet est vraiment devenu publique et les médias relaient toutes les informations le concernant. Si je préfère concentrer mon récit sur cet animal, c'est qu'il vit caché au cœur de nos massifs forestiers, que personne n'en parle et que l'essor de sa population a entraîné de profonds bouleversements environnementaux.
J'ai étudié le sanglier à l'école forestière où nous avions des cours de cynégétique. L'école possédait des enclos dans lesquels était élevé cet animal. Chaque étudiant à tour de rôle avait en charge d'aller les nourrir. Tous les ans, nous prélevions et vendions de jeunes sangliers pour les relâcher dans la nature en partenariat avec des sociétés de chasse. L'école participait également à des reprises de grand gibier dans la forêt de Trois Fontaines domaine de L'office National de la chasse. Le but de ces captures était de « recheptelliser » des forêts où les grands animaux avaient pratiquement voir totalement disparu. L'élaboration du plan de chasse était arrivé trop tard, il fallait dans un premier temps réparer l'effondrement cynégétique au plan national. Dans les années 80 la présence du sanglier dans la plupart des départements était résiduels où inexistante.Il y a donc eu à cette époque de nombreux relâchés de suidés sur l'ensemble du territoire. Cette grande campagne de réimplantation du sanglier dans nos forêts fut une réussite totale. Elle dépassa même toutes les espérances, non seulement la population renaissait, mais elle allait connaître un tel essor qu'elle allait 30 à 40 ans plus tard poser de gros problèmes.
Plusieurs causes ont rendu possible cette explosion démographique du sanglier. Cet animal sauvage est un nomade par nature. De tous temps il fallait, soit lui courir après, soit attendre son passage pour le chasser. Pour contourner ce problème et obliger le vagabond à se sédentariser il suffisait simplement le nourrir. Encore fallait il trouver l'aliment qui permettait de lui apporter assez d' énergie. Une céréale cultivée dans notre pays sur de grandes surfaces. Le maïs. Cette denrée à haute valeur énergétique a complètement transformé et dynamisé la reproduction de l'animal. Une laie, la femelle du sanglier est en mesure d'avoir aujourd'hui plusieurs portées dans l'année. L' épandage de maïs à mis un terme aux mortalités hivernales. L'autre intervention humaine qui a radicalement transformé la reproduction de l'espèce et conduit à la surpopulation que nous connaissons aujourd'hui. C'est l'hybridation du sanglier avec le cochon domestique. Une manipulation dont le but était double. :Enrayer son caractère nomade et booster les naissances en lui donnant la capacité reproductive de notre cochon commun. Ainsi la laie née dans l'année peut elle aussi mettre bas et celles qui sont plus âgées avoir plusieurs portées dans l'année. Il ne faudrait pas croire que ce soit un phénomène anecdotique, il est établi par les scientifiques suivant cet animal, qu'il y aurait moins de 5% de sanglier à avoir conserver un patrimoine génétique pur. D'ailleurs cette hybridation est visible sur l'animal avec la perte des critères morphologiques spécifiques à l'espèce.De nos jour cet animal n'a plus rien de sauvage, il fait l'objet d'un véritable élevage industriel au cœur nos forêts. Une alimentation lui est dispensée tout au long de l'année. Pour un secteur de chasse de la forêt où je fais mes images qui fait deux cent cinquante hectares quelques vingt mille euros sont dépensés rien qu'en épandage de maïs pour une année. C'est tout de même indécent quand on sait qu'un milliard d'êtres humains souffrent de la faim sur la planète.
Pourquoi souligner l'importance de la population de sangliers et argumenter que les prélèvements de la chasse sont de l'ordre de 15 à 20 mille animaux tués sur certains départements, alors qu'ils étaient inexistants à l'époque de mes études. Tout simplement pour dénoncer l'impact destructeur que cet animal exerce sur l' environnement.Arrivé à une telle surpopulation il est impossible que les compagnies de sangliers puissent se suffire des épandages de maïs, tout est consommé.Un pillage systématique des parcelles en régénération est réalisé année après année mettant en péril l'avenir de nos forêts. Une consommation de tout ce qui vit au sol, végétaux, insectes, batraciens, oiseaux nicheurs ainsi que les jeunes des autres espèces n'ont aucune chance devant cet omnivore . Beaucoup d'espèces protégées à haute valeur patrimoniale disparaissent de son fait. Il participe activement par l'ampleur de sa population à la perte de biodiversité. Et encore je ne décris pas les dégâts qu'il occasionne aux cultures, dégâts qui permettent la pratique de la chasse en dehors de la période légale, sous forme de battues administratives payées par le contribuable. Les maladies dont il est porteur que la surpopulation risque de rendre épidémiques. Les accidents qu'il provoque en traversant les routes.
Pourtant ce n'est pas le sanglier qui est à blâmer.Je le côtoie au plus près. Je le regarde vivre tout au long de l'année. Je me réjouis de pouvoir l'observer dans sa vie de groupe. L'éducation que les laies donnent aux marcassins,les combats et les courses poursuites des grands mâles au moment du rut. Mais je vois aussi ce qu'il fait à la forêt et je sais que le surnombre est artificiel, entretenu uniquement pour le plaisir d'une minorité.
Nos anciens n'avaient ils pas montré plus d'intelligence. Ils avaient interdit l'entrée de la forêt aux cochons domestiques que les paysans amenaient à la glandée sous les grands chênes. Ils avaient constaté qu'après plusieurs siècles de cette pratique la forêt en était sortie ruinée. Aujourd'hui le sanglier exerce la même pression sur les massifs forestiers que les cochons du moyen âge, à croire que nous n'avons rien retenu de notre histoire. Il est grand temps que les consciences s'éveillent. Que l'équilibre agro-sylvo cynégétique soit enfin respecté. Que les agrainages cessent et ne soient réservés qu'aux hivers trop rudes.Que le monde de la chasse qui a obtenu le label de protecteur de la nature soit mis devant ses responsabilités. Qu'il mette fin à l'élevage intensif du sanglier au sein des massifs forestiers uniquement pour le plaisir de la pratique de la chasse. Que c'est un acte égoïste qui met en péril nos forêts, qu'ils n'en n'ont pas le droit car ces espaces naturels sont avant tout des biens communs.